BOOK X

The Book of the Double Twilight

 

LIVRE X

Le Livre du Double Crépuscule

 

 

One who came, love and lover and beloved

Eternal, built himself a wondrous field

And wove the measures of a marvellous dance.

There in its circles and its magic turns

Attracted he arrives, repelled he flees.

In the wild devious promptings of his mind

He tastes the honey of tears and puts off joy

Repenting, and has laughter and has wrath,

And both are a broken music of the soul

Which seeks out, reconciled, its heavenly rhyme.

Ever he comes to us across the years

Bearing a sweet new face that is the old.

His bliss laughs to us or it calls concealed

Like a far-heard unseen entrancing flute

From moonlit branches in the throbbing woods,

Tempting our angry search and passionate pain.

Disguised the Lover seeks and draws our souls.

He named himself for me, grew Satyavan.

For we are man and woman from the first,

The twin souls born from one undying fire.

Did he not dawn on me in other stars ?

How has he through the thickets of the world

Pursued me like a lion in the night

And come upon me suddenly in the ways

And seized me with his glorious golden leap !

Unsatisfied he yearned for me through time,

Sometimes with wrath and sometimes with sweet peace,

Desiring me since first the world began.

He rose like a wild wave out of the floods

And dragged me helpless into seas of bliss.

Out of my curtained past his arms arrived;

They have touched me like the soft persuading wind,

They have plucked me like a glad and trembling flower,

And clasped me happily burned in ruthless flame.

I too have found him charmed in lovely forms

And run delighted to his distant voice

And pressed to him past many dreadful bars.

If there is a yet happier greater god,

Let him first wear the face of Satyavan

And let his soul be one with him I love;

 

Celui qui est venu, amour, amant et bien-aimé

Eternel, construisit lui-même un champ admirable

Et tissa les mesures d'une danse merveilleuse.

Là, dans ses cercles et ses courbes magiques

Attiré il arrive, repoussé il s'enfuit.

Dans les impulsions errantes et désordonnées de son esprit

II goûte le miel des larmes et retarde la joie

Par le repentir, il a le rire et il a la fureur,

Et tous deux sont une musique brisée de l'âme

Qui recherche, réconciliée, son rythme céleste.

Toujours il vient à nous à travers les années

Portant une douce figure nouvelle qui est l'ancienne.

Sa félicité nous rit, ou elle appelle cachée

Comme une flûte lointaine, invisible et enchanteresse

Venant de branches éclairées par la lune dans les bois palpitants,

Tentant notre recherche irritée et notre peine passionnée.

Déguisé, l'Amant cherche et attire nos âmes.

Il s'est nommé pour moi, a grandi Satyavan.

Car nous sommes l'homme et la femme depuis le commencement,

Les âmes jumelles nées d'un feu unique qui ne s'éteint pas.

Ne m'est-il pas apparu dans d'autres étoiles ?

Comme il m'a, à travers les taillis du monde,

Poursuivie comme un lion dans la nuit

Et venu à moi subitement sur les chemins

Et m'a saisie d'un bond doré glorieux :

Insatisfait il me voulait à travers le temps

Parfois avec fureur et parfois avec une douce paix,

Me désirant depuis que le monde commença.

Il surgit comme une vague déréglée hors des flots

Et m'attira, sans défense, dans des mers de béatitude.

Hors de mon passé voilé ses bras arrivèrent ;

Ils m'ont touchée comme un doux vent persuasif,

Ils m'ont cueillie comme une fleur heureuse et tremblante,

Et m'ont serrée heureusement brûlée dans une flamme implacable.

Moi aussi je l'ai trouvé, charmée par des formes ravissantes

Et j'ai couru charmée vers sa voix lointaine

Et me suis empressée vers lui en passant de terribles barrières.

S'il y a un dieu encore plus grand et plus heureux,

Qu'il revête d'abord la figure de Satyavan

Et que son âme soit une avec celui que j'aime :

 

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So let him seek me that I may desire.

For only one heart beats within my breast

And one god sits there throned. Advance, O Death,

Beyond the phantom beauty of this world ;

For of its citizens I am not one.

I cherish God the Fire, not God the Dream."

But Death once more inflicted on her heart

The majesty of his calm and dreadful voice:

"A bright hallucination are thy thoughts.

A prisoner haled by a spiritual cord,

Of thy own sensuous will the ardent slave,

Thou sendest eagle-poised to meet the sun

Words winged with the red splendour of thy heart.

But knowledge dwells not in the passionate heart;

The heart's words fall back unheard from Wisdom's throne.

Vain is thy longing to build heaven on earth.

Artificer of Ideal and Idea,

Mind, child of Matter in the womb of Life,

To higher levels persuades his parents' steps;

Inapt, they follow ill the daring guide.

But Mind, a glorious traveller in the sky,

Walks lamely on the earth with footsteps slow;

Hardly he can mould the life's rebellious stuff,

Hardly can he hold the galloping hooves of sense:

His thoughts look straight into the very heavens;

They draw their gold from a celestial mine,

His acts work painfully a common ore.

All thy high dreams were made by Matter's mind

To solace its dull work in Matter's jail,

Its only house where it alone seems true.

A solid image of reality

Carved out being to prop the works of Time;

Matter on the firm earth sits strong and sure.

It is the first-born of created things,

It stands the last when mind and life are slain,

And if it ended all would cease to be.

All else is only its outcome or its phase:

Thy soul is a brief flower by the gardener Mind

 

Ainsi qu'il me recherche pour que je le désire.

Car un seul cœur bat au-dedans de ma poitrine

Et un seul dieu est assis là sur le trône. Avance, ô Mort,

Au-delà de la beauté fantôme de ce monde :

Car je ne suis pas un de ses citoyens.

Je chéris Dieu le Feu, non pas Dieu le Rêve."

Mais, une fois de plus, la Mort infligea sur son cœur

La majesté de sa voix calme et inexorable :

"Tes pensées sont une brillante hallucination.

Un prisonnier haie par une corde spirituelle,

Ou l'esclave ardente de ta propre volonté sensuelle,

Tu envoies, avec un port d'aigle pour rencontrer le soleil

Des mots ailés de la rouge splendeur de ton cœur.

Mais la connaissance ne demeure pas dans le cœur passionné ;

Les paroles du cœur retombent sans être entendues du trône de la Sagesse.

Vaine est ton aspiration à construire le ciel sur la terre.

Artificier de l'Idéal et de l'Idée,

Mental, enfant de la Matière dans la matrice de la Vie,

Vers des niveaux supérieurs, entraîne les pas de ses parents,

Inaptes, ils suivent mal le guide hardi.

Mais le Mental, un voyageur glorieux dans le ciel,

Marche en boitant sur la terre avec des pas lents ;

A peine peut-il mouler la substance rebelle de la vie,

A peine peut-il tenir les sabots galopants des sens :

Ses pensées regardent tout droit dans les deux mêmes ;

Elles tirent leur or d'une mine céleste,

Ses actes travaillent douloureusement un minerai commun.

Tous tes hauts rêves étaient faits par le mental de la Matière,

...........................................................................................*

La seule maison où lui seul semble vrai,

Une solide image de la réalité

Sculptée pour être l'étai des œuvres du Temps ;

Sur la terre ferme la matière est assise forte et sûre.

Elle est le premier-né des choses créées,

Elle demeure la dernière quand le mental et la vie sont tués,

Et si elle prenait fin, tout cesserait d'être.

Tout le reste n'est que son produit ou sa phase ;

Ton âme est une brève fleur, par le Mental jardinier

 

* Une ligne manque dans la traduction dont le sens est le suivant :

Pour se consoler du travail fastidieux dans la prison de la Matière.

 

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Created on thy Matter's terrain plot;

It perishes with the plant on which it grows,

For from earth's sap it draws its heavenly hue:

Thy thoughts are gleams that pass on Matter's verge,

Thy life a lapsing wave on Matter's sea.

A careful steward of Truth's limited means,

Treasuring her founded facts from the squandering Power,

It tethers mind to the tent-posts of sense,

To a leaden grey routine clamps Life's caprice

And ties all creatures with the cords of Law.

A vessel of transmuting alchemies,

A glue that sticks together mind and life,

If Matter fails, all crumbling cracks and falls.

All upon Matter stands as on a rock.

Yet this security and guarantor

Pressed for credentials an impostor proves

A cheat of substance where no substance is,

An appearance and a symbol and a nought,

Its forms have no original right to birth:

Its aspect of a fixed stability

Is the cover of a captive motion's swirl,

An order of the steps of Energy's dance

Whose footmarks leave forever the same signs,

A concrete face of unsubstantial Time,

A trickle dotting the emptiness of Space:

A stable-seeming movement without change,

Yet change arrives and the last change is death.

What seemed most real once, is Nihil's show.

Its figures are snares that trap and prison the sense;

The beginningless void was its artificer:

Nothing is there but aspects limned by Chance

And seeming shapes of seeming Energy.

All by Death's mercy breathe and live awhile,

All think and act by the Inconscient's grace.

Addict of the roseate luxury of thy thoughts,

Turn not thy gaze within thyself to look

At visions in the gleaming crystal, Mind,

Close not thy lids to dream the forms of Gods.

At last to open thy eyes consent and see

The stuff of which thou and the world are made.

 

Créée sur ton pan de terrain de la Matière ;

Elle périt avec la plante sur laquelle elle croît,

Car de la sève de la terre elle tire sa nuance céleste :

Tes pensées sont des rayons qui passent sur la lisière de la Matière,

Ta vie est une vague qui coule sur la mer de la Matière.

Un intendant soigneux des moyens limités de la Vérité,

Amassant les faits établis provenant du Pouvoir gaspilleur,

II enchaîne le mental aux pieux de tente des sens,

A une routine gris de plomb, il cramponne le caprice de la Vie

Et attache toutes les créatures avec les cordes de la Loi.

Un récipient d'alchimies transmutatrices,

Une glu qui colle ensemble le mental et la vie,

Si la Matière faillit, tout s'écroulant craque et tombe.

Sur la Matière, tout se tient comme sur un roc.

Pourtant, cette sécurité, cette garantie

Pressée par ses lettres de créance, prouve être un imposteur ;

Une tromperie de substance où la substance n'est pas,

Une apparence, un symbole et un néant,

Ses formes n'ont aucun droit originel à la naissance ;

Son aspect de stabilité fixe

Est le couvert du remous d'un mouvement captif;

L'ordre des pas de la danse de l'Energie

Dont les pas laissent toujours les mêmes empreintes,

La face concrète du temps immatériel,

Un suintement pointillant le vide de l'Espace :

Un mouvement qui semble stable sans changement,

Pourtant des changements surviennent et le dernier changement est la Mort.

Ce qui, un temps, semblait le plus réel est la parade du Néant.

Les figures sont des pièges qui attrapent et emprisonnent les sens ;

Le vide sans commencement en était l'artisan :

II n'y a rien excepté des aspects enluminés par la Chance

Et les apparences de formes d'une apparence d'Energie.

Tous par la miséricorde de la Mort respirent et vivent pour un temps,

Tous pensent et agissent par la grâce de l'Inconscient.

Adonnée au luxe le plus rosé de tes pensées,

Ne tourne pas ton regard au-dedans de toi pour voir

Des visions dans le cristal miroitant, esprit,

Ne ferme pas tes paupières pour rêver les formes des Dieux.

Consens enfin à ouvrir tes yeux et vois

L'étoffé dont vous êtes faits, toi et le monde.

 

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Inconscient in the still inconscient Void

Inexplicably a moving world sprang forth:

Awhile secure, happily insensible,

It could not rest content with its own truth.

For something on its nescient breast was born.

Condemned to see and know, to feel and love,

It watched its acts, imagined a soul within;

It groped for truth and dreamed of Self and God.

When all unconscious was, then all was well.

I, Death, was king and kept my regal state,

Designing my unwilled, unerring plan,

Creating with a calm insentient heart.

In my sovereign power of unreality

Obliging nothingness to take a form,

Infallibly my blind unthinking force

Making by chance a fixity like fate's,

By whim the formulas of Necessity,

Founded on the hollow ground of the Inane

The sure bizarrerie of Nature's scheme.

I curbed the vacant ether into Space;

A huge expanding and contracting breath

Harboured the fires of the universe:

I struck out the supreme original spark

And spread its sparse ranked armies through the Inane,

Manufactured the stars from the occult radiances,

Marshalled the platoons of the invisible dance;

I formed earth's beauty out of atom and gas,

And built from chemic plasm the living man.

Then Thought came in and spoilt the harmonious world:

Matter began to hope and think and feel,

Tissue and nerve bore joy and agony.

The inconscient cosmos strove to learn its task;

An ignorant personal god was born in Mind

And to understand invented reason's law,

The impersonal Vast throbbed back to man's desire,

A trouble rocked the great world's blind still heart

And Nature lost her wide immortal calm.

Thus came this warped incomprehensible scene

Of souls enmeshed in life's delight and pain

And Matter's sleep and Mind's mortality,

 

Inconscient dans le Vide toujours inconscient

Inexplicablement, un monde en mouvement jaillit :

Pendant un temps en sécurité, heureusement insensible,

II ne pouvait se contenter de sa propre vérité.

Car sur son sein ignorant quelque chose naquit

Condamné à voir et à savoir, à sentir et à aimer,

II observa ses actions, imagina une âme au-dedans,

Tâtonna en quête de la vérité et rêva d'un Moi et de Dieu.

Quand tout était inconscient, alors tout allait bien.

Moi, la Mort, j'étais roi et gardais mon état royal,

Préparant mon plan infaillible sans volonté,

Créant avec un cœur calme et insensible.

Dans mon pouvoir souverain d'irréalité

Obligeant le rien de prendre une forme,

Infailliblement, ma force aveugle sans penser

Faisant par hasard une fixité comme celle du destin,

Par caprice, les formules de la Nécessité,

Fonda sur le terrain creux de l'Absurde

Les bizarreries certaines du plan de la Nature.

J'ai courbé l'éther vacant en Espace ;

Un souffle énorme se dilatant et se contractant

Hébergea les feux de l'univers :

J'allumai l'étincelle originelle suprême

Et répandis l'éparpillement de ses armées rangées à travers le Vide,

J'ai manufacturé les étoiles avec des radiations occultes,

Arrangé les pelotons de la danse invisible ;

J'ai formé la beauté de la terre avec l'atome et le gaz,

Et construit avec le plasma chimique l'homme vivant.

Alors la Pensée arriva et abîma le monde harmonieux ;

La matière commença à espérer, à penser, à sentir,

Les tissus et les nerfs portèrent la joie et l'agonie.

Le cosmos inconscient s'efforça d'apprendre sa tâche ;

Un dieu personnel ignorant naquit dans le mental

Et, pour comprendre, inventa la loi de la raison,

L'Immensité impersonnelle palpita en réponse au désir de l'homme,

Un trouble secoua le grand cœur aveugle et tranquille du monde

Et la Nature perdit son vaste calme immortel.

Ainsi arriva cette scène pervertie et incompréhensible

D'âmes prises au filet de joie et de peine de la vie

Et le sommeil de la Matière et la mortalité du mental,

 

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Of beings in Nature's prison waiting death

And consciousness left in seeking ignorance.

This is the world in which thou mov'st, astray

In the tangled pathways of the human mind,

In the issueless circling of thy human life,

Searching for thy soul and thinking God is here.

But where is room for soul or place for God

In the brute immensity of a machine ?

A transient Breath thou takest for thy soul,

Born from a gas, a plasm, a sperm, a gene,

A magnified image of man's mind for God,

A shadow of thyself thrown upon Space.

Interposed between the upper and nether Void,

Thy consciousness reflects the world around

In the distorting mirror of ignorance

Or upwards turns to catch imagined stars.

Or if a half Truth is playing with the earth

Throwing its light on a dark shadowy ground,

It touches only and leaves a luminous smudge.

Immortality thou claimest for thy spirit;

But immortality for imperfect man,

A god who hurts himself at every step,

Would be a cycle of eternal pain.

Wisdom and love thou claimest as thy right;

But knowledge in this world is error's make,

A brilliant procuress of Nescience,

And human love a posturer on earth-stage

Who imitates with verve a feary dance.

An extract pressed from hard experience,

Man's knowledge casked in the barrels of Memory

Has the harsh savour of a mortal draught:

A sweet secretion from the erotic glands

Flattering and torturing the burning nerves

Love is a honey and poison in the breast

Drunk by it as the nectar of the gods.

Earth's human wisdom is no great-browed power,

And love no gleaming angel from the skies.

If they aspire beyond earth's dullard air,

Arriving sunwards with frail waxen wings

How high could reach that forced unnatural flight ?

 

D'êtres attendant la mort dans la prison de la Nature

Et la conscience abandonnée à la recherche de l'ignorance.

Tel est le monde dans lequel tu te meus, errant

Dans les chemins enchevêtrés du mental humain,

Dans le cercle sans issue de ta vie humaine,

A la recherche de ton âme et pensant que Dieu est ici.

Mais où y a-t-il de l'espace pour une âme et une place pour Dieu

Dans l'immensité brutale d'une machine ?

Un souffle transitoire, tu le prends pour ton âme

Né d'un gaz, d'un plasma, d'un sperme, d'un gène,

Une image magnifiée du mental humain comme Dieu,

Une ombre de toi-même jetée sur l'Espace.

Interposée entre le Vide supérieur et le Vide inférieur,

Ta conscience reflète le monde alentour

Dans le miroir déformant de l'Ignorance,

Ou vers le haut se tourne pour attraper des étoiles imaginaires,

Ou si une demi-vérité joue avec cette terre

Projetant sa lumière sur l'ombre d'un sol obscur

Elle touche seulement et laisse une tache lumineuse.

Tu réclames l'immortalité pour ton esprit,

Mais l'immortalité pour l'homme imparfait,

Un dieu qui se fait mal à chaque pas,

Serait un cycle de peine éternelle.

La sagesse et l'amour, tu les réclames comme ton droit ;

Mais dans ce monde la connaissance est faite par l'erreur,

Une brillante entremetteuse de la Nescience,

Et l'amour humain un acrobate sur l'estrade de la terre

Qui imite avec verve une danse féerique

Un extrait pressuré d'une dure expérience,

La connaissance de l'homme embarillé dans les barriques de la mémoire

A l'acre saveur d'une potion mortelle :

Une sécrétion sucrée des glandes érotiques

Flattant et torturant les nerfs embrasés,

L'amour est un miel et un poison dans la poitrine

Bu par elle comme le nectar des dieux.

La sagesse humaine de. la terre n'est pas un pouvoir intimidant

Et l'amour n'est pas un ange radieux venu des cieux.

S'ils aspirent au-delà de l'air lourd de la terre,

Arrivant vers le soleil avec de frêles ailes de cire

A quelle hauteur peut atteindre ce vol forcé contre nature ?

 

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But not on earth can divine wisdom reign

And not on earth can divine love be found;

Heaven-born, only in heaven can they live,

Or else there too perhaps they are shining dreams.

Nay, is not all thou art and doest a dream ?

Thy mind and life are tricks of Matter's force.

If thy mind seems to thee a radiant sun,

If thy life runs a swift and glorious dream,

This is the illusion of thy mortal heart

Dazzled by a ray of happiness or light.

Impotent to live by their own right divine,

Convinced of their brilliant unreality,

When their supporting ground is cut away,

These children of Matter into Matter die.

Even Matter vanishes into Energy's vague

And Energy is a motion of old Nought.

How shall the Ideal's unsubstantial hues

Be painted stiff on earth's vermilion blur,

A dream within a dream come doubly true ?

How shall the will-o'-the-wisp become a star ?

The Ideal is a malady of thy mind,

A bright delirium of thy speech and thought,

A strange wine of beauty lifting thee to false sight.

A noble fiction of thy yearnings made,

Thy human imperfection it must share:

Its forms in Nature disappoint the heart,

And never shall it find its heavenly shape

And never can it be fulfilled in Time.

O soul misled by the splendour of thy thoughts,

O earthly creature with thy dream of heaven,

Obey, resigned and still, the earthly law.

Accept the light that falls upon thy days;

Take what thou canst of Life's permitted joy,

Submitting to the ordeal of Fate's scourge

Suffer what thou must of toil and grief and care.

There shall approach silencing thy passionate heart

My long calm night of everlasting sleep :

There into the hush from which thou cam'st retire."

 

Mais ce n'est pas sur terre que peut régner la sagesse divine

Et pas sur terre que l'amour divin peut être trouvé ;

Nés du ciel, seulement au ciel ils peuvent vivre,

Ou bien, là aussi peut-être ils sont des rêves brillants.

Bien plus, tout ce que tu es et tout ce que tu fais, n'est-ce point un rêve ?

Ton mental et ta vie sont des trucs de la force de la matière.

Si ton mental te semble un soleil radieux,

Si ta vie coule selon un rêve rapide et glorieux,

Ceci est l'illusion de ton cœur mortel

Ebloui par un rayon de bonheur ou de lumière.

Impotents à vivre par leur propre droit divin,

Convaincus de leur brillante irréalité,

Quand le terrain qui les supporte est enlevé,

Ces enfants de la Matière meurent dans la Matière.

La Matière elle-même s'évanouit dans le vague de l'Energie

Et l'Energie est un mouvement du vieux Néant.

Comment les nuances immatérielles de l'Idéal

Peuvent-elles être peintes tenaces sur le barbouillage vermillon de la terre,

Un rêve dans un rêve est-il doublement vrai ?

Comment le feu follet peut-il devenir une étoile ?

L'Idéal est une maladie de ton mental,

Un brillant délire de ta parole et de ta pensée,

Un étrange vin de beauté te soulevant à une vision fausse.

Noble fiction issue de tes aspirations

Elle doit partager ton imperfection humaine :

Ses formes dans la Nature désappointent le cœur,

Et jamais elle ne trouvera sa forme céleste

Et jamais peut-elle être accomplie dans le Temps.

Ô  âme égarée par la splendeur de tes pensées,

Ô  créature terrestre avec ton rêve du ciel,

Obéis, résignée et tranquille, la loi de la terre.

Accepte la lumière qui tombe sur tes jours ;

Prends ce que tu peux de la joie permise de la Vie,

Te soumettant à l'ordalie du fléau du Destin

Souffre ce que tu dois du labeur, de la douleur et du souci.

Réduisant au silence ton cœur passionné, s'approchera

Ma nuit longue et calme de sommeil perpétuel :

Là, dans le silence d'où tu es venue, retire-toi."

 

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